samedi 2 janvier 2010

Salutation


Bonjour,

2 janvier 2010, cela semble une bonne date pour commencer quelque chose.
Bientôt de nombreux jours seront passés après celui-ci, dont j'ignore encore la matière et le nom, des années peut-être, et ce vieux 2 janvier me semblera bien loin, bien ignorant de ce qui allait venir, bien perdu dans le cours du temps et des choses, et n'aura que peu de sens au regard de ce qui fera alors le cœur vivant de mon quotidien, et peut-être, si le monde venait à changer de face, du nôtre.
Mais aujourd'hui ce moment ressemble encore à un début, un début est toujours plaisant, allons-y.

Que sera ce blog, je ne le sais pas encore vraiment : à l'origine envisagé comme un lieu de partage de musique, voici que le premier objet que je m'apprête à mettre à disposition est un film de Jean-Luc Godard, Lettre à Freddy Buache.
L'idée de la lettre n'est somme toute peut-être pas si hasardeuse ici : le titre de ce blog, les amitiés lointaines, évoque bien sûr ces affinités qui se nouent, sans les rapprochements du temps ou des lieux, sans la rencontre avec des êtres de chair et de corps, leurs auteurs, avec des disques, avec des livres, avec des films, avec des objets dont la présence et la parole illuminent et éclairent, comme des amis ou des amies, l'endroit du monde où nous marchons.
Il y a aussi, c'est la lettre, ce début d'un livre de Sloterdijk, probablement L'Éducation de l'être, sinon les Règles pour le parc humain, il y dit très simplement que les livres écrits sont comme des lettres que l'on adresse à des amis que l'on ne connaît pas ; et que nous, lecteurs qui les lisons, nous recevons. Écrire ces lettres pour le bien des autres, les amis inconnus, est une définition qu'il donne à l'humanisme.
Blanchot disait déjà, en recherche d'essence, dans L'Espace littéraire, que le livre n'est qu'un objet fermé, et que "l'œuvre ne devient œuvre que lorsqu'elle est l'intimité de quelqu'un qui l'écrit et de quelqu'un qui la lit".
Alors ces livres, ces disques, ces films, ces paroles enregistrées dans des studios de radio et colportées trente ans plus tard en mp3, prenons-les pour ce qu'elles sont, pour ce qu'ils sont : des lettres à des amis, à des amies, sans nom et sans lieu à l'avance, et dont nous recevons, comme des cadeaux multipliables, le présent, et dont nous devenons, comme par hasard et désormais éternellement, les destinataires.
Ce n'est pas pour elles ou pour eux, pas pour ces paroles, pour ces films, que nous le faisons, c'est pour nous, et puis finalement c'est peut-être aussi un peu pour eux : voici qu'à présent nous marcherons dans le monde avec leur voix à nos côtés, présence accompagnatrice avec laquelle nous entendrons un peu mieux le monde, nous verrons un peu mieux les choses, un peu mieux, ou un peu autrement ce qui est toujours mieux que de manière unique, avec laquelle notre vie sera plus belle, moins solitairement dressée dans le désert où nous jette le temps, lieu de plus de rencontres, de plus de sensations, de plus de bonheurs et de plus de joie.



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